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CRO et biotech : l’intérêt de partenariats bien compris
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CRO et biotech : l’intérêt de partenariats bien compris

Les données de l’Observatoire 2011 réalisé par le comité biotech du Leem montrent que la France n’est qu’une puissance moyenne dans le domaine des biotechnologies en santé (1). Alors que le secteur compte 446 entreprises réparties entre 388 PME et 58 laboratoires pharmaceutiques et de diagnostic in vitro, ces derniers sont à l’origine, à eux seuls, de 85 % des 14 milliards d’euros du chiffre d’affaires de la biotech santé française. Parallèlement, les PME du secteur ne génèrent qu’un CA de 1,5 milliard d’euros. A titre de comparaison, le Danemark réalise un résultat équivalent avec 150 entreprises. En termes de produits, le portefeuille des PME françaises reste aussi en retrait par rapport aux principaux compétiteurs du secteur et n’a pas encore atteint un niveau de maturité comparable à celui de l’Allemagne ou du Royaume-Uni. Il compte aujourd’hui 150 produits en développement, en majorité des molécules chimiques issues des biotechnologies (51 %) et des immunothérapies (33 %), les 15 % restants se répartissent entre protéines thérapeutiques, thérapies géniques et thérapies cellulaires et tissulaires. Au Royaume-Uni et en Allemagne, les portefeuilles des entreprises biotech sont nettement plus fournis, avec respectivement 450 et 400 produits, dont 220 pour le premier et 150 pour le second sont parvenus au stade clinique. Autre difficulté des biotech santé françaises, leurs effectifs sont souvent réduits : 86 % des entreprises ont moins de 50 salariés. Pourtant, le potentiel existe. La France occupe le 5ème rang mondial de la recherche scientifique en sciences de la vie et de la santé et l’Observatoire 2011 des biotech santé indique que « la France se situe en deuxième position derrière la Chine en termes de nombres d’entreprises actives en biotechnologies de santé toute typologie d’entreprises confondues » (1).

Des besoins spécifiques

Un des points de blocage majeurs en France réside dans l’aptitude de ses sociétés de biotech à atteindre un niveau de développement suffisant et à mettre au point un nombre significatif de produits capables de répondre aux attentes et aux besoins de leurs marchés potentiels. A ce stade, une des pistes importantes passe par le développement de partenariats, de collaborations avec des entreprises spécialisées capables de leur apporter ces expertises tout en tenant compte de leurs spécificités et de leurs besoins propres. En effet, les entreprises biotech doivent pouvoir positionner très tôt leur produit en fonction de leurs moyens et de leurs objectifs. Dans ce contexte, leurs plans de développement doivent satisfaire plusieurs critères fondamentaux. Ils se doivent non seulement de répondre aux nombreuses exigences réglementaires en vigueur, mais ils doivent aussi être capables de mettre en évidence le plus tôt possible les points faibles de leur produit. Ce critère s’avère fondamental pour permettre à la biotech d’anticiper et de pouvoir résoudre au plus vite d’éventuelles difficultés futures. Pour réussir au mieux le plan de développement d’un produit, elle aura donc besoin de recourir à une large palette de compétences opérationnelles diversifiées (services scientifiques, techniques, cliniques et réglementaires). Il s’agit par exemple de disposer de soutien médical, logistique et méthodologique ou encore d’accéder à des compétences en gestion de projet et en gestion de données. Or, les biotech, généralement orientées vers une recherche « pure », plus fondamentale, manquent de connaissances réglementaires et n’ont pas suffisamment conscience des problématiques de l’assurance qualité. Elles sont en particulier confrontées à un déficit de profils professionnels spécifiques, notamment des spécialistes du développement de produits, profils dont il leur est néanmoins difficile, voire impossible, de disposer en interne, à la fois pour des raisons de coût et de niveau d’activité pouvant justifier leur embauche.

Comment choisir « sa » CRO ?

Dans ce contexte, la biotech a donc besoin de recourir aux services des CRO. Le choix qu’elle va réaliser constitue un enjeu majeur pour l’avenir de son produit, voire pour l’avenir de la société elle-même, puisque le portefeuille des biotech ne compte généralement qu’un nombre très limité de produits. En ne se trompant pas dans son choix, elle va donc pouvoir se donner le plus de chances de réussite. Néanmoins, un des premiers problèmes auquel elle va se retrouver confrontée réside dans la sélection d’une CRO réellement adaptée à ses besoins. Par exemple, elle pourra avoir besoin, en fonction de la molécule étudiée, de s’adresser plutôt à des CRO généralistes ou à des CRO spécialisées. Mais comment s’y retrouver et identifier la « bonne » CRO dans un univers en évolution constante entre fusions-acquisitions, cohabitation de CRO internationales et locales et apparition de nouveaux acteurs issus du secteur public à l’instar des CIC ? En résumé, des sociétés de tailles différentes adaptées à des marchés et à des modes de collaboration différents et aux cultures industrielles diverses, voire opposées.

Autre difficulté à surmonter, la question du cahier des charges, souvent mal défini au départ par la biotech. Il est alors très difficile de trouver une CRO capable de s’adapter à ces situations souvent complexes et de redéfinir le cahier de charges. De plus, la biotech doit aussi être en mesure de contester, de challenger les propositions des CRO lorsqu’elle sélectionne le partenaire avec lequel elle travaillera faute de compétences internes.

Des compétences indispensables

En contrepartie, le partenariat avec la CRO adaptée va contribuer à valoriser la biotech. La CRO va en effet pouvoir lui proposer une stratégie de développement d’un point de vue méthodologique et statistique qui lui permette d’optimiser et de sécuriser le devenir de son projet. Elle peut en particulier l’orienter pour le positionnement de son produit en termes d’aire thérapeutique, de choix et de nombre des indications à développer en priorité. Il faut en effet toujours garder à l’esprit qu’un bon positionnement et un développement de qualité contribuent à améliorer la valorisation d’un produit lors de négociations avec un laboratoire pharmaceutique.

De surcroît, la CRO présente l’avantage de proposer une diversité de compétences que la biotech ne peut pas se permettre d’avoir en interne. Ici, on relèvera notamment l’importance du conseil médical qu’une CRO peut fournir. Ses médecins sont généralement dotés d’une culture médicale riche, leur travail leur ayant donné l’opportunité d’acquérir de l’expérience sur une grande variété de produits dans des indications thérapeutiques diverses. Elle doit aussi apporter son expérience et ses compétences dans les domaines méthodologiques opérationnels et réglementaires. Elle est également à même de déterminer les démarches réglementaires à réaliser pour avoir suffisamment d’informations sans verrouiller d’options tout en valorisant au mieux la société. La CRO, par son expérience de l’assurance qualité, peut réaliser les opérations de contrôle qualité afin de garantir que l’ensemble des données et documents issus de la biotech sont irréprochables.

Le portrait de la CRO optimale

Quelles qualités majeures doit alors réunir une CRO pour pouvoir se positionner comme un partenaire de choix pour une biotech ? Il est avant tout indispensable que le projet de la société biotech constitue réellement un enjeu stratégique et économique pour la CRO. Sa taille doit également être compatible avec celle de la biotech, à savoir suffisamment petite pour être en prise avec les réalités et les contraintes des structures biotech mais aussi suffisamment importante pour être à même de concentrer et de fidéliser les compétences nécessaires. La CRO doit également être dotée de capacités méthodologiques importantes pour être en mesure de s’adapter à la diversité des types de produits et de projets innovants qu’il est possible de rencontrer dans le paysage de la biotech. Une caractéristique qui demande également qu’elle sache faire preuve d’ouverture d’esprit et de curiosité, qualités indispensables pour prendre en charge des projets innovants, voire inédits. Sa souplesse intellectuelle doit aussi être importante pour être à même d’identifier les problèmes souvent inédits que posent les projets innovants de la biotech et plus encore pour en trouver les solutions. Son excellence opérationnelle et en assurance qualité doit être à même de mettre en place des process spécifiques complexes et recevables par les autorités compétentes.

La CRO optimale doit également fonctionner selon un modèle proche de celui de la biotech, afin de garantir le partage de valeurs et de visions communes. Elle doit notamment avoir fait le choix stratégique de s’engager dans la R&D de nouvelles méthodologies (e.g. plans expérimentaux et adaptatifs) et d’outils permettant de fournir des solutions innovantes pour le développement de produits eux aussi innovants. Elle doit réserver une partie de ses activités à la veille réglementaire et participer à l’établissement des règlementations de demain (groupes de travail, lobbying).

Enfin, elle doit être en mesure de présenter une offre adaptée en termes de contenu et d’enjeux financiers. Celle-ci doit lui permettre de garantir à la biotech un service complet et spécialisé, à des tarifs « équilibrés » pour lui permettre de maximiser le potentiel de son produit. Ici, il faut rappeler que l’enjeu est majeur pour la biotech qui ne doit pas hésiter à mettre les moyens financiers nécessaires pour ne pas risquer de gâcher le potentiel de son produit.

Des modes de financements à redéfinir ?

Si les relations entre CRO et biotech relèvent plus du partenariat que de la simple prestation de services, se pose alors avec acuité la question du financement dudit partenariat. Le choix d’un règlement à la prestation se heurte souvent aux contraintes financières fortes de biotech dont la culture est souvent plus familière du capital-risque et d’un financement conditionné par le franchissement de milestones. Quels peuvent être les retours possibles pour une CRO travaillant avec une biotech ? Quels modèles de financement pourraient permettre de répondre aux besoins des CRO et des biotech ?

Une première voie passe par la valorisation de son partenariat avec une biotech via un effet d’entraînement.  Une CRO qui a déjà travaillé avec une biotech et connaît donc déjà les spécificités de ce secteur peut bénéficier du bouche à oreille pour la promotion de ses compétences dans l’univers biotech. Cette valorisation peut aussi passer par la participation de la CRO à des actions stratégiques de la biotech. Il peut s’agir de la participation de la CRO à ses négociations pour la cession de son produit à des laboratoires pharmaceutiques. Autre élément de retour possible, la poursuite de la sous-traitance pour d’autres activités de la biotech, une fois qu’un premier projet a déjà été réalisé avec une CRO.

Concernant la voie du financement, plusieurs options peuvent être appréhendées. Tout d’abord, on peut penser au versement de royalties sur le produit final. Mais cette option ne semble a priori pas envisagable car elle implique un partage des royalties avec les investisseurs ayant financé la biotech. Autre possibilité le versement de success fees (ou rémunération au résultat), selon un modèle de fonctionnement inspiré des banques d’affaires, où le versement d’honoraires est conditionné par l’atteinte de résultats définis dans le contrat de départ. Véritable pari dans le temps pour la CRO, cette solution peut constituer un partenariat gagnant-gagnant mais nécessite d’avoir défini avec soin les jalons déterminant le règlement des honoraires.

Enfin, tout comme les biotech font appel au capital-risque pour leur financement, les CRO pourraient, quant à elles, faire appel au capital-développement. L’idée ici est de contribuer à sécuriser les investissements d’un financeur dans des sociétés de biotech. En choisissant d’investir aussi dans une CRO spécialiste des biotech, il peut s’assurer de contribuer au développement d’une CRO professionnelle qui sera capable de maximiser le potentiel des produits de son propre porte-feuille de sociétés de biotech. La démarche vise à permettre à la CRO de continuer à investir en R&D et de développer un niveau de performance encore plus élevé.

(1) Source : données de l’Observatoire 2011 des biotech santé en France réalisé par le comité biotech du Leem (http://biopharmanalyses.fr/premier-observatoire-des-biotech-sante-du-comite-biotech-du-leem/)

Cet article est un publi-informationnel réalisé à partir de propos recueillis auprès d’Antoine Périer (photo), pdg de la CRO Cardinal Systems et d’interfaces investisseurs-biotech.

 


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